Éphémère
tranche de vie !!
Histoire d’une March Brown
Mais qu’est-il
arrivé ?
Je me suis réveillée en
cette belle matinée de mars, sous mon caillou, vous savez, celui qui se trouve
près de la berge, celui que je n’ai jamais quitté, celui qui abrite tant d’autres
habitants que moi, celui qui nous protège….
Je me sens bizarre,
j’ai peur, j’ai le sentiment que ce jour n’est pas comme les autres, pourtant,
pour l’instant, rien d’inhabituel, l’eau est froide mais cela ne me dérange pas.
Mes sœurs sont probablement
réveillées elles aussi.
Nous sommes nombreuses
ici. Le coin nous plait bien, c’est calme.
Durant plusieurs
heures, je réfléchis, quel est ce sentiment étrange qui m’oblige aujourd’hui à
me poser tant de questions ? Je ne sais plus… Suis-je excitée, suis-je effrayée ?
Je n’y tiens plus,
il faut que je sache !! Finalement, quelle est ma destinée, que vaut ma vie ?
L’eau s’est
légèrement réchauffée, le ciel est clair, la surface m’attire…
..
Je
me lance, je quitte mon caillou, mes voisins, ma famille…..
Je me laisse bercer
tout d’abords quelques secondes par le courant, puis je réagis, je remue, je lutte,
je nage, je sais que je peux y arriver, courage !!!!
Me voilà proche de
la surface et dans un dernier effort, je m’y accroche.
Je me sens dériver,
et soudain, ce sentiment d’insécurité qui me ronge depuis ce matin prend tout
son sens, je suis devenue une proie.
Oh j’en avait bien
entendu parler de cette histoire de poissons qui habiteraient là, dans la même
rivière que nous, mais je ne voulais pas le croire….
Mes ailes sont
à présent sorties de leur enveloppe et je ressens la chaleur du soleil qui est
en train de me les sécher, mon corps change… Enfin, je vais devenir une adulte.
Je suis hors de l’eau,
je surfe sur ces vaguelettes qui me chatouillent les pattes, c'est agréable.
Cet instant est
magique, je ne suis pas la seule à avoir franchi le pas, j’ai tout autour de moi
des centaines de convives. Nous sautons, nous glissons, c’est la fête !!!!
La fête ???
Non pas pour longtemps …..
Une de mes sœurs
vient de disparaître dans un remous monstrueux, nous sommes maintenant toutes
effrayées, les ronds se font de plus en plus présents.
C’est horrible,
mes amies se font happer sans avoir le temps de réagir, c’est un véritable carnage
qui se produit sous mes yeux.
Je tente de fuir,
je prends mon envol, je m’éloigne du danger….
C’est
trop difficile, le vent me renvoie sur l’eau, je suis épuisée, je dérive, je n’ai
plus le courage de lutter, mon heure est venue…
Comme prévu,
j’ai fini ma vie dans le ventre d’un poisson, ma vie qui venait pourtant à peine
de commencer, ma vie qui fût si courte, si éphémère…..
Éphémère, voilà le nom que l’on me donne, mais maintenant,
je sais pourquoi….
Amis pêcheurs,
n’oubliez pas que sans nous, la pêche à la mouche n’aurait plus aucun sens. . Eddie
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