Il pleut il mouille, c’est la fête à la grenouille !!!

 

 

L’école est finie aurait pu chanter Sheila, si elle avait été un peu plus âgée en cette  fin juin de l’année de mes 10 ans.......!!!

 

« Cul sec »  avait, contre toute attente emmené toute la classe  faire une promenade dans le forêt du Banney pour ce dernier jour de l’année scolaire…

 

                                                                    . !

« Cul sec », c’était notre instituteur, respecté et même un peu craint ! Pourquoi Cul sec??Mystère..en tous cas sa sobriété n'était pas en cause!! Maigre comme un clou, long comme « un jour sans pain » comme aurait dit ma mère, la jambe droite aussi raide qu’une jambe de bois qui lui donnait cette démarche si caractéristique qui nous le faisait repérer de loin, et une calvitie naissante qui dégarnissait  son front orné d’une « boule » de la taille d’une noix, en fait  une « loupe du cuir chevelu » ai-je appris bien plus tard, et qui gonflait quand il se mettait en colère prétendait Claude Liblin,le cancre officiel de la classe, ce qui n’était pas vrai mais nous ravissait quand même !

 

                                                                                                                             

 

 

 La cinquantaine, le cheveu long mais rare soigneusement plaqué en arrière, toujours habillé d’une veste et d’un pantalon  marron  trop large pour ses jambes maigres, il ne souriait guère, sévère mais pas méchant…Je crois que c’était en fait un grand timide auquel nous ne connaissions ni femme ni enfants………mais qu’en savions nous ??

Il n’avait en tous cas pas un très grand sens de l’humour, lui qui m’avait flanqué « 500 lignes » sans hésiter pour désigner le coupable, après s’être assis sur la punaise que j’avais déposée sur sa chaise……en remplacement de la colle de la semaine d'avant,  heureusement découverte par une main méfiante avant l'irrémédiable outrage à son pantalon,...tout comme lorsqu’il avait trouvé collées toutes les pages de son « cahier de punitions » où je tenais la vedette » !!!

 

Après deux années sous sa férule, j’étais parti sous d’autres cieux pour le rencontrer 10 ans plus tard, un soir alors que je traversais le parc de l’établissement thermal et que je m’étais accoudé à la barrière pour admirer la piscine sous la lune…mon voisin de droite  faisait de même et je reconnus Cul sec….bonsoir monsieur Lalloz…je suis Jean Paul……avaient suivi quelques paroles banales, sans plus…..avant que chacun ne s’éloigne de son côté ….sans rien avoir exprimé en fait…. !

 

Je le revis un peu plus tard encore, alors qu’il habitait une maisonnette pas très loin de chez mes parents et prenait ses quartiers au bistrot tabac du coin où j’allais chercher mes premiers paquets de gitanes…il lui arrivait de venir servir au comptoir comme le jour où, en me vouvoyant, il me vendit le paquet de gitanes réclamé…. !Il m’avait reconnu, sans doute mais ce grand timide n’avait pas bronché…je m’en veux encore aujourd’hui de ne pas m’être assis à une table pour lui offrir un verre et parler enfin, ou même ne n’être pas allé sonner à sa porte pour évoquer avec lui  les années passées……quel adolescent au coeur sec étais-je à cette époque pour ne pas avoir senti le besoin de l’approcher……..je le regrette tant aujourd’hui…lui dont je n’ai même pas une photo de classe…trop timide pour accepter d’y figurer… !

 

                                    On ne vous oubliera jamais..adieu monsieur le professeur chantera plus tard Hugues Auffray !!

 

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Partis en rang de l’école, nous étions descendus derrière l’église avant de longer l’étang de chez « Depreux » sur lequel nous nous retrouvions l’hiver quand il était gelé pour faire du patin à glace, avant d’arriver à la maison forestière à moitié enfouie dans les grands arbres de l’orée de la forêt.. et avoir le droit de nous disperser sur la route forestière qui conduisait à quelques Kms au hameau de Saint Valbert avec son ermitage , où j’avais passé une année de fin de guerre chez les Robert, un copain de régiment de mon père qui avait accepté, pour nous mettre à l’abri des bombardements de la base de saint Sauveur toute proche de chez nous, de nous prendre en pension, ma sœur et moi, dans leur petit bistrot de campagne en compagnie de leurs 4 enfants !

                                                                                                        

 

Cul sec, mal à l’aise dans son rôle de père de famille promenant sa marmaille nous surveillait du coin de l’œil mais sans inquiétude, habitués que nous étions à ces forêts où nous étions chez nous…… !Il nous amena auprès de deux étangs grouillants de batraciens qui me donnèrent immédiatement des idées pour les jours suivants….qui occupèrent mon esprit tout le long du chemin du retour…… !

 

 

Le lendemain, premier jour de vacances, réunion au sommet dans l’immense grenier de mes parents entre :

 

 Le promoteur de l’idée de génie…moi !!  et puis….

 

Philippe Bedon, le « bon élève, calme, réfléchi et posé, un tantinet poète sur les bords et doux rêveur,  le modèle à suivre …à côté duquel m’avait d’autorité placé Cul sec au premier jour, espérant que la contagion ferait son effet et que je serais, au contact des ce phénix, contaminé par la grâce qui ferait de moi ….quelque chose d’autre !!!

 

Il est de fait que j’avais été impressionné le premier jour par le regard courroucé de réprobation que Philippe m’avait lancé quand, avec un naturel et une aisance nés d’une longue habitude, j’avais discrètement sorti de mon pupitre le livre ouvert à la page où se trouvaient les réponses aux questions tordues posées par Cul Sec à l’interrogation écrite !! Ma note ayant été supérieure à la sienne…Philippe , qui était intelligent, avait réfléchi et compris que ma méthode avait du bon en matière d’efficacité…..et la contagion avait effectivement eu lieu…dans un sens qui n’avait pas été envisagé …..et en fin d’année, Philippe et moi étions unis par une solide  amitié soudée par une complicité sans faille et une habileté commune à couillonner Cul Sec, ravi de nos brillants résultats communs …et pour cause !!!

                                                                                                                   

  Les deux frères bedon étaient des bourgeois de la ville, négociants en vin, très  distingués tous deux, très « vieille France » avec un look cependant très anglais, habitant une immense maison dans la rue principale en  haut de la ville avec dépendances et verger, chacun occupant deux étages…Les parents de Philippe  avaient 4 garçons, dont il était le benjamin,  le frère avait 4 filles, dont deux jumelles de notre âge……jamais un mot plus haut que l’autre, classe et distinction..et gentillesse extrême à l’égard du garnement que j’étais, auquel on pardonnait tout, y compris son franc parler et sa « mauvaise éducation  car…j’étais "le copain dePhilippe", avec lequel j’étais assorti comme……le jour avec la nuit !!! !

 

Je devais quitter tout ce monde en entrant en 6ème l’année suivante, condamné aux « bons pères » qui avaient comme « mission impossible »…de m’éduquer, et mon plaisir fut grand de voir y débarquer l’année d’après…..Philippe Bedon lui-même qui, en mon absence , n’avait pu tenir les promesses scolaires sur lesquelles comptaient ses parents qui , en désespoir de cause, s’étaient résolu à me l’envoyer puis qu’ensemble…ça baignait dans l’huile et c’est en sa compagnie que je fis tout mon secondaire, lui le matheux doué en tout, moi, le nul en maths,  considéré « par défaut » comme plutôt littéraire …doué en pas grand-chose si ce n’est  en foot.…mais le binôme fonctionnait si bien !!!

                                                                                                         

Les vacances nous retrouvaient au bord de la rivière où nous passions la quasi-totalité de nos journées très vite conquis par le lancer léger qui à l’époque était si productif qu’avec notre minable matériel nous prenions alors plus de poisson que 30 années plus tard avec un attirail sophistiqué et ruineux de pêcheur à la mouche !

 

 

C’est Philippe qui se mit à la mouche le premier, initié par un cousin à lui et qui, l’année suivante m’initia moi également….. !! A partir de ce jour, nous avons tous deux abandonné la cuillère pour la mouche…je pêchais…Philippe…prenait du poisson. !

 

 Le 3ème protagoniste était Guy Dalberto, une petite crapule au visage d’ange et au cœur d’or, dit » Dato » ! Malin comme un singe, vif comme l’éclair il était

                                                                                                                  

 doté d’un charme fou dont il jouait habilement comme de son sourire charmeur permanent accompagnant les pires vacheries ! Champion des combines tordues, il osait tout….et notamment, ce qui faisait notre admiration, glisser sa main sous les jupes des filles qui protestaient…pour la forme…sauf quand il en profitait pour déposer dans leur culotte du « gratte cul », quand ce n’était pas un  lézard ou un hanneton …  

                                                                                                      

C’est lui qui, un jeudi matin  au sortir du catéchisme, me persuada de le laisser recopier "in extenso" ma rédaction sous le prétexte qu’il n’avait pas fait la sienne et que «Cul sec » pour peu qu’on les sépare dans la pile, n’y verrait que du feu !! Son charme, sa conviction, la force de persuasion de sa voix douce et mielleuse et de son hypocrite  regard de velours  étaient tels que je me retrouvai  à  plat ventre cote à cote avec lui  dans le couloir chez mes parents pour le « recopiage » consciencieux de ma prose qu’il prit quand même la peine  d’agrémenter de quelques fautes d’orthographe et de quelques « retours à la ligne supplémentaires » qui devaient sans nul doute égarer définitivement Cul Sec !!

 

La sanction fut brutale..zero pour les deux et 500 lignes chacun !! Heureusement, nous avions l’habitude d’en « faire d’avance » et notre cancre national, Claude Liblin, expert en la matière, nous donna à cette occasion un « truc » étonnant mais combien efficace !!

 Il avait remarqué que  lorsqu’on lui remettait 100 lignes, soit une feuille double quadrillée à gros carreaux de 23 lignes par page ,Cul sec qui, grand seigneur, feignait  d’ignorer les deux lignes en «  déficit », la prenait  dans sa main droite pour jeter un œil sur le recto première page puis le verso 4ème page sans ouvrir pour vérifier si les pages intérieures  2 et 3 étaient écrites,..avant de déchirer le tout qui passait alors à la corbeille !!

Forts de cette information, dont acte..et Cul sec déchira ainsi nos..250 lignes chacun comptabilisées pour 500 !

Je me suis demandé, plus tard, s’il était vraiment dupe ou si, brave homme au fond,….il nous le laissait croire… !

 

C’est encore lui qui  mobilisa une  après midi, alors que je jouais justement avec Alain Causeret dans le jardin de ses parents, toute la caserne des pompiers!

                                         

                                             

 Grimpé on ne sait comment en haut de château d’eau qui dominait la campagne, il ne savait redescendre et ses gestes affolés , tout la haut, avaient fini par alerter quelque passant !  C’est à grand renfort de « PIN PON »  que la grande échelle vint au secours de notre garnement de copain dont on n’a jamais su ce qu’il était allé foutre là haut !!

 

Dato était le fils d’un immigré italien, menuisier discret et taciturne, mort jeune d’un cancer du poumon, installé à la sortie de la ville pas loin de chez les Causeret, dans un atelier en face duquel son épouse tenait un petit magasin de meubles fabriqués par son époux !

Sa mère, petite boule brune souriante et douce attachait fréquemment son fils, lorsqu’elle s’absentait,  avec une chaîne au pied de la grosse table de sa cuisine pour l’empêcher de fuguer, ce qu’il faisait régulièrement pour se rendre à pieds à travers la forêt chez sa tante à Breuches, à une dizaine de Kms, et défrayait ainsi la chronique de la petite ville où les commentaires allaient bon train : "il paraît que Guy Dalberto a encore disparu"…et les gendarmes le retrouvaient régulièrement chez la tante…..

Je n’ai jamais su ce que cachaient ces fugues répétitives… !!!

 

Le dernier complice était Alain Causeret, le fils du Docteur Causeret chez qui parents et enfants se vouvoyaient et chez qui on prenait le thé l’après midi en jouant au bridge !

Pour ces raisons majeures , le pauvre Alain avec sa grosse tête de blond roux et ses yeux un peu globuleux qui lui donnaient toujours l’air étonné, sa voix grave et posée un peu précieuse, était vite devenu notre tête de Turc d’autant que grand naïf trop bien élevé pour imaginer que l’on puisse dira autre chose que la vérité, il gobait toutes les absurdités que dégoisait Dato et que nous reprenions en cœur, ce qui lui attirait pas mal d’ennuis car il les colportait ensuite avec conviction…quelles qu’elles soient….mais il faisait partie de notre groupe et personne d’autre que nous n’aurait eu le droit de le persécuter !!

 

                                                                                                                  

 

C’est ainsi, persuadé par le perfide Dato que son jardin était colonisé par des chats sauvages enragés très dangereux  et qu’il se devait , en tant que fils de Docteur, de faire mission de « salut public » en exterminant cette vermine, qu’ il sortit la carabine 6mm de son docteur de père, trouva les balles, ce qui nous permit durant une après midi d’absence des parents de tirer depuis la fenêtre de la salle de bains sur les deux chats du voisin, heureusement sans dommage pour eux, mais avec quelques dommages pour la serre vitrée sous laquelle "madame mère" cultivait des fleurs rares… !!

Sa tête le lendemain nous en dit long sur la séance qui suivit le retour des parents alors que nous étions prudemment partis à temps, lui laissant le soin d’expliquer les dégâts et la disparition de la boite de balles…… !!!!

La qualité de Docteur de son père,   de plus médecin scolaire qui nous passait la visite et nous vaccinait, lui conférait quand même une certaine « aura »…Et je lui fut très reconnaissant  le jour ou son père décréta lors de sa visite  que j’avais….un zizi trop long et qu’il faudrait le raccourcir !!

La nouvelle fit le tour de l’école et lorsque je revins de « l’opération »..ma popularité fut telle que pour 5 francs de l’époque, soit aujourd’hui  moins de un centime d’euro, j’acceptais de montrer « la chose » à qui voulait bien « payer », sans distinction de sexe, et les filles n'étaient pas les moins curieuses, ce qui me permit  à l’époque de m'offrir quantité de caramels à 1 franc dans  l’épicerie poussiéreuse de  la mère Masla, rue du fossé des cannes, dont certains étaient «  gagnants » et donnaient droit à un gratuit..qui pouvait être gagnant aussi !!

 

                                                                                                                             *********

.La conférence porta sur le projet d’une partie de pêche à la grenouille pour le jeudi suivant, ce n’était pas une mince affaire car il fallait obtenir l’autorisation des parents, fabriquer des « balances » avec du fil de fer et du filet , trouver de la ficelle pour les suspendre au bout de rames de haricot faisant office de canne à pêche, trouver du chiffon rouge pour les en garnir en leur milieu car  censé attirer les grenouilles comme nous l’avions appris des paysans du coin. !!Les rôles distribués, les conjurés se séparèrent, rendez vous donné au jour J chez moi, chacun avec le matériel qu’il lui incombait de se procurer … !

 

Le jour venu, Philippe arriva le premier en tout début d’après midi, Alain Causeret ne vint pas, nous apprîmes plus tard que l’autorisation lui avait été refusée par les parents, quant à Dato, sa mère fut intraitable : nous nous étions arrêtés en passant devant chez lui… il était enchaîné à la table de la cuisine pour avoir encore fugué l’avant-veille ….. !!

 

Nous n’étions donc plus que deux mais nous avions 3 balances suspendues à leur perche, deux charmottes d’osier et deux bocaux en verre…, ma mère m’avait fourni largement en chiffon rouge et malgré la défection des deux autres, les choses se présentaient bien !!

 

La forêt du Banney nous accueillit sous son ombre fraîche……mais il nous fut impossible de retrouver les deux étangs de Cul sec….avant d' avoir tourné en rond pendant deux heures …..il était déjà plus de 16heures !!

 

Les grenouilles étaient au rendez vous, énormes, il y en avait souvent deux l’une sur l’autre, et nos chiffons rouges les attirait irrésistiblement ! il suffisait de poser sur l'eau la balance suspendue par trois ficelles au bout de la perche,  de la laisser couler juste assez pour que seul le chiffon rouge attaché au milieu du filet flotte à la surface et immédiatement une ou deux grenouilles approchaient et restaient prisonnières du filet lorsque l’on remontait brusquement la balance !!

                                                                                             

 

     Les charmottes se remplissaient,  nos prises s’en échappaient régulièrement et nous étions si occupés à courir après les fugueuse, à remonter les balances avant de les remettre à l’eau que subitement la nuit fut la…les charmottes débordaient, les bocaux bien mal pratiques étaient pleins aussi et il fallait s’en retourner….

 

Pas question de remonter dans la forêt bien trop sombre et hostile et il fut décidé de poursuivre la petite route qui descendait et qui nous amena heureusement bientôt à la grand route de Faucogney  à 5 ou 6km de la ville,  mais nous savions où nous étions et malgré la nuit noire et nos estomacs qui criaient famine, nos bestioles qui continuaient à s’échapper et que nous poursuivions sur la route, le moral revint au beau fixe, et pour l’entretenir on se mit à chanter .. 

                   "un km à pied, ça use ça use, un km à pieds, ça use les souliers……

                     deux km a pieds….ça use, ça use…….."

 nous en étions aux environs de 680 km à pieds en montant le petite côte de l’entrée de la ville, pas très loin de la maison de Docteur Causeret quand une voiture plein phares pila devant nous d’où jaillirent mon père, ma mère en larmes, le commissaire de police et monsieur Henriot, le bistrotier d’en face de chez mes parents qui, en  bon voisin, les accompagnait !!

 

    Ma mère rentrée à la maison s’était inquiétée de mon retard, avait téléphoné aux autres parents pour apprendre finalement que nous étions partis à deux au lieu de 4 et s’était alors imaginée que l’un était tombé à l’eau et que l’autre voulant le secourir s’était noyé avec lui !

Le commissaire de police tiré de son lit avait pris les choses en mains et dans la voiture du bistrotier complaisant  était parti en exploration en compagnie de mes parents après avoir demandé à Cul sec la direction des étangs…….bien nous en avait pris de revenir par la route plutôt que par la forêt !!

 

Philippe fut déposé devant chez lui au passage et le voisin nous ramena à la maison où m’attendait Dato libéré par sa mère pour soutenir le moral de mes parents, avant de raccompagner le commissaire pressé de retrouver son lit !! Il était quand même bientôt minuit!!

 

Le produit de la pêche monté dans la cuisine, mon père se pencha dessus et décréta péremptoire, soutenu par le traître Dato : «  ce sont des crapauds »…. ! Consternation du pêcheur qui ne voulait rien savoir, soutenu par sa mère éplorée tellement soulagée d’avoir retrouvé son rejeton qu’elle avait cru perdu qu’elle affirmait qu’il s’agissait bien de « grenouilles grises » qu’elle était prête à cuisiner  pour les faire avaler  à mon père , qui ne voulut rien savoir… !

 Il fallut séance tenante se séparer de toute la ménagerie  dans un petit canal qui coulait pas très loin  de la maison, ce dont se chargea, avec un empressement qui me parut suspect,  Dato qui en rajouta une couche en me disait d’un air réprobateur : « tout de même, jean Paul, tu en fais du souci à tes parents.. !! » Ma mère qui  malgré ses larmes ne put s’empêcher de s’esclaffer devant le culot du garnement fugueur doit encore en rigoler aujourd’hui dans sa tombe… !!…..

 

Le lendemain j’appris que Philippe avait été fraîchement accueilli et vertement tancé pour être rentré si tard, après l'heure du repas, par des parents qui avaient refusé de s’inquiéter et qui l’avaient expédié au lit sans manger pour lui apprendre les bonnes manières…on ne badinait pas avec l’éducation chez les Bedon !

 

Moi j’avais été choyé et chouchouté, tel le fils prodigue…..et le curé qui me préparait  à ma communion, curieux des détails et du nombre de nos captures, m’apprit  que toute la ville, une fois encore, ne parlait que de nos exploits…..mais cette fois je faisais quasiment figure de héros, rescapé miraculeux d’une aventure périlleuse !!

 

Le surlendemain parut dans le journal un entrefilet: le laboratoire pharmaceutique de Vesoul achetait 10 francs pièce, l’équivalent aujourd’hui de un centime et demi d’euro, soit dix caramels de la mère Masla (dont certains gagnants).. , des crapauds pour en extraire le venin contenu dans les cloques de la peau……..je n’ai jamais su si nos exploits étaient à l’origine de cet entrefilet mais il était trop tard, mes caramels étaient tombés à l’eau du canal par les mains de Dato, en même temps que le produit de notre pêche !!

 

                                                                                                                 ********************

 La vie est passée..............

 

J’ai perdu de vue Alain Causeret…pendant 60 ans! Il m'a retrouvé récemment par la magie du net grâce à son petit fils qui a lu ces textes de ma main, reconnu et alerté son grand pêre....avec lequel nous avons constaté que nous avoins exercé tous deux....à 30km l'un de l'autre en Bretagne dans la même profession sans jamais nous être rencontrés!

 

La sœur de Dato qui tient un magasin de rideaux  et à laquelle je suis allé rendre visite m’a appris que son frère était assureur dans la région d’Annecy, et je pense qu’il a du tout au long de sa vie avec son bagout, son charme et son sourire dévastateur vendre tout les contrats qu'il voulait  à bien des ménagères subjuguées, avant de disparaître à 60 ans dans un accident de voiture..!…….

                                                                                                                                 *****

 Philippe, que je revoyais régulièrement,après de brillantes études d’ingénieur à Besançon est mort à 35 ans, en décembre 1974, 1 an après nous nous soyons retrouvés  pour patiner  une dernière fois sur l'étang de chez Depreux  gelé comme aux plus beaux jours de notre enfance.. !

.Il avait, suite à une angine mal soignée contractée chez les bons père, développé une valvulopathie  responsable de ses lèvres bleutées quant nous jouions au foot, et qui avait, sans que personne ne s'en préoccupe,.... on "planait un peu" chez les Bedon, bouzillé son cœur qui s’est arrêté la  veille de Noël, alors qu’ il achetait  dans un grand magasin de  Grenoble ses derniers cadeaux pour sa ravissante  femme aux  superbes yeux bleus et ses deux filles  qui doivent aujourd’hui avoir une quarantaine d’années ……..j'ignorais qu'il avait également un fils plus jeune....qui, coincidence troublante, vient de me contacter ce 01/10/2009 pour avoir, comme le petit fils d'Alain Causeret, retrouvé son pêre dans mes écrits..toujours par les hasards du net....!!!

 

     Je suis fidèlement retourné voir ses parents chaque année lorsque je revenais à Luxeuil., j'y étais accueilli comme un fils ....il est vrai que Philippe était  mon frère......de coeur.....!

 

                     Son père est mort plus que centenaire..........je relis souvent la superbe lettre qu'il m'a envoyée lors du décès de son fils. avec lequel nous étions, selon ses termes, "si complémentaires ....et que j'avais honoré et enrichi de ma chaude amitié"....

 

                            .Il ne m'avait manifestement pas tenu rigueur de  … la journée des grenouilles....!!

                                                                                                

                                                                                                                                    *****

 

 

                                                                               

 

 

 

                                                                                                        

 

 

 

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