Jean Rodier « En remontant les ruisseaux »
(L'escampette: 2010)

 

 

Le livre :

Rien à rajouter au quatrième de couverture, parfait...et pour cause...puisqu' il a été écrit avec le talent qu'on lui découvrira à la lecture, par l'auteur lui même

 

  

L'auteur (1951-2013)

Jean Rodier, dont on sait finalement peu de choses, né à Versailles en août 1951 arrive trois ans plus tard à Poitiers où il fait toutes ses études, au lycée Henri-IV. Après une année de philosophie, il fait un passage éclair à l'école de journalisme de la rue du Louvre à Paris. Commence alors une vie de petits boulots, en compagnie de bons amis, et de vagabondages partagés entre la capitale et le Haut Gévaudan.
Il a travaillé à domicile, pendant plusieurs années, dans le sud de la Vienne.. Il est décédé en 2013.

En 2010, Jean Rodier a été finaliste du Prix Médicis . et lauréat du 24e Prix du livre en Poitou-Charentes en 2011 pour "En remontant les ruisseaux"

Mon opinion
cette promenade de pêcheur, ce "vagabondage le long des cours d'eau du Gévaudan" selon les propre termes de l'auteur, est un récit délicieux  admirablement écrit dans une langue imagée riche et brillante, très facile à lire en raison d'une fraîcheur et d'une fluidité qui évoquent celles des rivières

...tous les ruisseaux et rivières charrient des fragments, des atomes des territoires traversés. (f'aimerais être le goûteur d'eau qui saurait les reconnaître !)

qu'il arpente en pêchant :.........Le pêcheur épuisé se tient dans le lit de Ia rivière. Le soleil décline, fait vibrer les insectes voletant, émergeant, tombant, petits nuages dansant, s'insinuant dans son col. Autour de lui farios, chevesnes, gardons, ombres, ablettes, vandoises s'agitent, gobent, claquent du bec, trouent la surface de l'eau, dessinent de miroitants sillages........... ..... Je lance sous ma canne, comme un pêcheur au coup, et ma soie se déplie horizontale dans le vent....... Dans une brève accalmie le bas de ligne, donnant moins de prise au vent, s'incurve et l'imitation d'éphémère effleure l'eau au centre du courant, la soie gonflée comme une voile. Le gobage, le premier, est brutal, le fèrrage immédiat. J'épuise une fario de vingt-quatre centimètres........

et en observant les merveilles de la nature qui l'entoure,...La pluie redouble. Les grands frênes ruissellent. Les nuages sombres descendent, pèsent sur la vallée. ...... les marches dans les prés humides où stagnaient les odeurs,....... les cris des effraies et des chevêches, l'appel sourd des ducs, le glapissement d'un renard, des froissements d'ailes, le bruit de bêtes se faufilant dans les genêts.....,

la danse amoureuse d'un couple d'hermines , .....une seconde hermine apparaît, court vers la première. Elles s'enlacenr, roulent ensemble, se poursuivent, reviénnent vers le ruisseau, s'étreignent, tombent à I'eau à trois mètres de mes pieds, emmêlées l'une à l'autre, sans un cri, aussi vives que belettes, plus agiles que chats, fluides comme écureuils.................

le vol des oiseaux: : Dans l'air gris l'alouette, mince compagnonne................. Revenue sur son aire de reproduction, quand l'atmosphère se réchauffe, que vient la période des amours, elle s'arrache du sol et monte, verticale, dans le virulent az:ur, par paliers, et grisolle, grisolle, monte encore, Iaisse éclater sa joie, délivre son interminable et vibrante ritournelle qui dilate et arpente l'espace, monte dans le ciel à s'y dissoudre, ivre d'elle-même.................
......................Le faucon hobereau dessine sa danse athlétique au-dessus des chaos, le circaète jean-le-blanc plane sans bruit sur l'air chaud et odorant.....Sur un tertre, à quelques mètres de moi, s'est posé un grand corbeau solitaire, tout noir de suie éteinte, jusqu'en sa prunelle vitreuse, armé depuis la corne sombre du bec à ses serres acérées, puissant, farouche.

la frénésie saccadée du cingle plongeur: .....un huitième de tour, sursaut, clignement de l'oeil - un huitième de tour, sursaut, dans le sens des aiguilles d'une montre... et il recommence ! Sa danse de derviche tourneur survolté n'a pas de fin, puis d'un coup- il disparaît, comme catapulté.......

et même tout simplement ...les taureaux couleur d'argile, d'ocre brûlé, les vaches allaitantes et leurs veaux gambadants, les génisses aux yeux maquillés s'ébrouent dans les devèzes où court la grande résille des murets de granit....

et l'on comprend bien ses "quelques agacements" à l'égard de néfastes activités humaines

...........Ils n'ont de cesse de redresser, de rectifier, d'aplanir! Ici on retouche une colline, on comble un creux, 1à on mord le flanc de la forêt, on entaille la paroi rocheuse, on supprime un virage, on sécurise, on élargit,................... lorsqu'il sera trop tard, que se sera épanoui ce qui a commencé, les parcs à thème et d'attractions. les auroroutes et quatre-voies, les sentiers et activites balisés, les forfaits de groupe, le prêt à vivre architectural- la reconversion de ses paysans en gardiens ou en animateurs............

Ne vous posez pas de question, si vous le trouvez, achetez le, 14 euros!!,...Vous en aurez largement "pour votre argent", surtout si, comme l'auteur, vous savourez dans la pêche bien plus que le poisson dont il ne dédaigne pourtant pas de faire parfois son repas lorsque la chance lui a souri!

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Personnellement je m'en pose une, de question: pourquoi un tel écrivain dont la qualité d'écriture m'évoque celle de De Boisset, a-t-il été si peu "productif" ....et donc si peu connu.....??

 

 

 

 

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